Depuis trente ans, Internet est à la fois un protocole de communication et un réseau mondial offrant de nombreuses applications d’information et de communication. L’évolution de cette Toile mondiale a ouvert de nombreuses possibilités. Elle place aujourd’hui en concurrence les acteurs de l’Internet et les exploitants de réseau. L’imperfection de son architecture et de ses protocoles justifie les projets de son évolution.
I - Le réseau Internet et ses protocoles
L’accès à l’information disponible sur le réseau Internet s’effectue en mode paquets sur les bases du modèle en couches défini en 1980 par l’OSI (Voir DT N°17 et 18) et les normes internationales associées (Voir DT N°08).
Le protocole utilisé sur la Toile est le protocole Internet (IP) qui, en couche 3 du modèle OSI, définit le mode d’échange des paquets de données entre les ordinateurs raccordés et les bases de données du réseau. L’adressage unique au réseau des ordinateurs et des serveurs est actuellement définie par la version "IPv4", qui est en cours de remplacement par la version "IPv6" à compter de maintenant (voir DT N°31).
Le protocole TCP, en couche 4, (Transmission Control Protocol) assure l’établissement de la connexion et le contrôle de la transmission. TCP est un protocole de remise fiable. Il vérifie que le destinataire a bien reçu les données, même si cette remise n’est pas effectuée en temps réel. Le protocole UDP (User Data Protocol) également en couche 4, permet, en mode non connecté, de transmettre des paquets sans établir de connexion, et de communiquer de façon non fiable, mais proche du temps réel, à l’aide de datagrammes. A titre d’exemple, les données utilisent TCP et la communication vocale UDP.
Internet est un ensemble mondial de réseaux connectés par des liaisons et des routeurs. Les routeurs sont des dispositifs permettant de sélectionner le chemin que les paquets vont emprunter pour arriver à destination. Le message est remis de routeur en routeur par sauts successifs, le routeur lisant l’en-tête du paquet à transmettre et orientant ce dernier en fonction des protocoles de routage. Parmi ceux-ci, RIP (Routing Information Protocol, protocole d’information de routage), tend à être remplacé par OSPF (Open Shortest Path First), plus performant. Au sein du réseau de transport, le transfert des informations entre deux points est effectué par des passerelles à l’aide des protocoles IGP (Interior Gateway Protocol), EGP (Exterior Gateway Protocol), BGP (Border Gateway Protocol) et MPLS (Multiprotocol Label Switching).
Dans les couches supérieures, se trouvent les protocoles relatifs aux applications de données. Le transfert de fichiers met en jeu le protocole FTP (File Transfer Protocol). La messagerie sur Internet réclame l’emploi des protocoles SMTP (Simple Mail Transfer Protocol) pour l’envoi des messages, de POP3 (Post Office Protocol, version 3) pour le courrier électronique en réception. Interviennent également les protocoles IMAP (Internet Message Access Protocol), pour d’autres modes d’échange de courrier électronique, ICMP (Internet Control Message Protocol), pour le contrôle du protocole IP, HTTP (HyperText Transfer Protocol) pour la mise en œuvre du chargement et de l’affichage des pages de la Toile, etc.
Sur les liaisons d’accès portant le trafic Internet, des protocoles associant les couches 1 et 2 sont utilisés :en xDSL sur paires métalliques et en G-PON sur fibre optique. Les réseaux radioélectriques en 3G (IMT-2000) sont associés au RTPC. Ils permettent également la connexion à l’Internet en mode paquets et l’accès aux bases de données. Internet peut être accessible également par liaison satellitaire (Rec. S.1782 de l’UIT-R). Eutelsat propose un service Two-Way à 3,6 Mbit/s et des satellites spécialisés pourraient être construits pour offrir des débits à 10 Mbit/s pour un à deux millions de foyers répartis sur une trentaine de pays européens.
Le succès d’Internet favorise l’expansion du protocole IP dans les réseaux filaires, radioélectriques et satellitaires. Internet délivre les données sous la forme de données compatibles avec les réseaux existants, c’est-à-dire, soit en données synchrones (STM), asynchrones (ATM) ou en mode paquet (PTM) adaptables en Ethernet à 1 Gbit/s (GE).
II - Le réseau Internet et le réseau téléphonique public commuté
Par ses commutateurs, le RTPC permet l’accès d’une part au service téléphonique et à la télécopie à tous ses abonnés. Par son réseau de distribution, il permet également l’accès à l’Internet par le jeu de ses DSLAM (multiplexeur d’accès des lignes d’abonnés numériques) et aux serveurs et bases de données de l’Internet. L’accès à Internet est obtenu par l’intermédiaire de fournisseur d’accès (FAI) qui disposent chacun d’un réseau connecté lui-même à un ensemble mondial de liaisons et de commutateurs de l’Internet.
III - Organisation de l’Internet
Créée en 1986, l’IETF (Internet Engineering Task Force) est une entité indépendante, qui déploie son activité internationale en association avec l’Internet Society (ISOC), laquelle lui assure un cadre légal et un support financier. Elle rassemble une vaste communauté de chercheurs de spécialistes en réseau, d’exploitants et d’industriels, répartie en plus de 70 groupes de travail, qui s’intéresse à l’architecture d’Internet et à l’évolution de son exploitation. Les experts de l’IETF ne disposent auprès de l’IETF ni de statut, ni d’adhésion. L’IETF tient trois réunions annuelles, lesquelles sont ouvertes au public. L’objectif des ingénieurs de l’IETF est de fournir au réseau Internet les protocoles assurant la parfaite interopérabilité des équipements en provenance de différents vendeurs qui lui sont connectés.
Les directeurs de domaine de l’IETF nomment les directeurs des groupes de travail (Area Directeurs, AD). Ils appartiennent à l’Internet Engineering Steering Group (IESG). Les domaines étudiés (Areas) concernent principalement les applications, le réseau Internet, l’exploitation et gestion, les applications temps réel et l’infrastructure, l’acheminement, la sécurité et le transport.
L’IAB (Internet Architecture Board) est chargé de l’orientation à long terme d’Internet et des activités confiées à l’IETF. L’Internet Society (ISOC) gouverne l’IESG et l’IAB. L’ensemble des AD et le Président de l’IETF forment l’IESG (Internet Engineering Steering Group), lequel est responsable de l’ensemble de la gestion de l’IETF.
La IANA coordonne l’attribution des valeurs des paramètres des protocoles de l’Internet. L’IRTF travaille sur l’évolution de l’Internet du futur (voir le point ci-dessous) en coordination avec les autres groupes de travail chargés des protocoles, des applications, de l’architecture et de la technologie.
IV - Le routage sur Internet
Les pays sont desservis par des serveurs "racines" (root name servers) et des serveurs de noms de domaines nationaux de premier niveau (ccTLD, country-code top-level domain), lesquels sont définis par l’ICANN et répondent à la norme ISO 3166. Les commutateurs Internet (Internet eXchange Points, IXPs) sont maillés de façon à garantir le service en cas de rupture de liaisons. Près de 160 pays ne disposaient pas d’IXP en 2009. Parmi les 88 pays dotés d’IXP, les Etats-Unis en possèdent 84, le Japon, 17, la France 15, l’Allemagne et le Brésil 14, la Suède 12, le Royaume-Uni 11, la Russie 11, etc.
L’extension de la Toile Internet nécessite la création de nouveaux centres d’interconnexion (IXP), ce qui rend plus complexe les tables de routage et les règles d’acheminement qu’utilisent les protocoles internes au réseau. Tout augmentation du nombre de centres traversés ralentit le parcours des paquets d’information, ce qui peut gêner le fonctionnement des serveurs et provoquer une dégradation de la qualité de service.
V - Les services offerts par Internet
Internet offre l’accès aux divers services numériques, tels que :
connexion à distance (Telnet), pour la connexion à une base de données,
transfert de fichiers (FTP), messagerie électronique (courriel),
conférences électroniques (news) ou forums (Usenet),
distribution de données en flux continu sur réseau à distribution de contenu (streaming),
convergence fixe- mobile (FMC),
création de réseaux de recherches académiques (GEANT, CERN/SURFnet, Internet2, etc.,
connexions bidirectionnelles par satellite de petites dimensions,
recherche de personnes ou de documents (finger, gopher, archie, wais, whois), World Wide Web, ou 3W, système de liens de textes, de messages audio et vidéo entre bases de données.
D’autre part, l’importance grandissante de la Toile a amené les instances internationales de normalisation (UIT et IETF) à coopérer. Internet a permis les réalisations suivantes : Création et expansion de "e-Bay", du moteur de recherche de Google, des réseaux sociaux YouTube, Skype, FaceBook, du Web2.0, de l’IPTV, de la diffusion en flux continu des images vidéo (streaming media) sur les réseaux à distribution de contenu, du "Cloud Computing", mise en place de l’IP dans les réseaux mobiles, dans les pays en développement, sur le FTTH et le G-PON (en compétition aux Etats-Unis avec FoIS et U-Verse), etc.
Le nombre d’Internautes des dix premiers pays en développement dépasse aujourd’hui le nombre des Internautes des pays développés. De nouvelles langues et de nouveaux alphabets sont introduits dans les procédures de communication. A la fin de Mars 2011, Internet comptait 2,1 milliards d’Internautes, dont 44 % en Chine, 16 % en Amérique du Nord et 22,7 % en Europe (France 45 millions). "Avec ses deux milliards d’Internautes et par la diffusion presque immédiate des messages à travers la Toile, Internet est devenu le réceptacle de toutes les rumeurs du monde".
VI - Les projets de développement en cours
Un certain nombre de projets sont en cours en vue d’améliorer l’architecture et l’offre de service d’Internet, notamment sur le plan de la sécurité, du respect de la vie privée, de la qualité de service de bout en bout, de la résistance aux attaques conduisant à des dénis de service (DDoS), de la mobilité, de la fiabilité, de l’adressage et de l’identification.
L’accès à Internet depuis les pays en développement fait l’objet du projet "3Ob Networks" (Réseau pour les trois autres milliards d’utilisateurs), financé par Google, Liberty Global et HSBC, avec l’utilisation de 16 micro satellites. D’autres recherches portent sur le routage des flux et la commutation, sur la commutation dynamique de circuit, sur la configuration du réseau central, sur le modèle point à point, sur la virtualisation de réseau, etc.
Parmi les projets en étude, citons : GENI (Global Environment for Network Innovations), FIND (Future Internet Design), Future Internet Architecture (FIA), Standford Clean Slate (pour réinventer l’Internet !), Akari program (nouvelle architecture proposée par le NICT japonais pour 2015 2020), European FP7 projets, Fire (Future Internet Research and Experimentation), EIFFEL (Evolved Internet Future for European Leadership), Hotnets, Future Media Internet, 4WARD, etc.
VII - L’Internet du futur
Internet n’a pas été conçu pour des applications de type commercial et personne ne saurait préciser son évolution. La mise en place d’un protocole demande des années de travail avant qu’un accord ne se dessine et il faut ensuite plusieurs années pour la généralisation de la mise en place. Plus le temps passe et plus le nombre de modifications à effectuer sur place devient difficile et même risqué en raison du trafic important (en volume et en nature) qui y transite. D’autre part, la crise économique réduit les investissements et ralentit les travaux de recherche. L’Internet du futur (et quelle version ?) arrivera-t-il à temps avant que les problèmes de gestion de trafic sur la Toile ne deviennent insurmontables ?
Certains experts critiquent le fait de placer sur le même réseau des petits flux (messages SMS) et des flux de trafic importants (vidéo, visioconférences, télévision mobile personnelle, jeux en ligne, applications médicales à haut débit, Internet des Objets, Smart Grid, ITS, etc.), ce qui tend à diminuer la qualité de service globale. La possibilité de congestion des artères internes à la Toile à l’occasion d’événements spécifiques a été annoncée à plusieurs reprises ("exafloods" avant 2012), justifiant la demande de crédits supplémentaires pour accroître la capacité des couches de réseau inférieures. Le taux de croissance annuel du trafic du réseau devrait cesser de progresser (il est actuellement de 40 à 50 % après avoir atteint les 100 %). La croissance du trafic vidéo, l’absence de sécurité des transactions et la vulnérabilité des protocoles posent actuellement un problème majeur. La consommation électrique de l’ensemble réseaux, terminaux, serveurs astreint les industriels à concevoir de nouveaux matériels plus économes en énergie (le quart des coûts des centres de données est lié à la consommation d’énergie).
Si les instances de normalisation se sont rapprochées, l’IETF/ISOC et l’UIT-T n’en poursuivent pas moins leurs propres projets à long terme sans trop de coordination globale. Les projets de l’IETF (ou associés) ne sont dirigés que par les résultats expérimentaux et par les succès des industriels et des fournisseurs d’applications sur Internet. D’autre part, l’absence d’une gouvernance forte de l’Internet pèse lourdement dans la gestion de la Toile (exemple du retard pris dans la mise en œuvre d’IPv6).
Dans le cas de l’UIT-T, la pression des exploitants de réseau est plus manifestement orientée vers la création de NGN avec l’IMS, avec un certain laxisme d’ailleurs (voir DT N°30). En effet, chacun des deux camps participe à tous les travaux de normalisation et espère parvenir un jour à fusionner les deux réseaux (RTPC et l’Internet), mais chacun à sa façon et chacun avec ses propres concepts de rémunération.
Dans la période actuelle, les utilisateurs disposent en conséquence d’un double choix technique pour téléphoner, pour envoyer des télécopies, pour regarder la télévision, etc. Il demeure que, même avec un faible niveau de qualité de service et des risques de piratage importants, la Toile Internet offre une gamme de services irremplaçables, attrayants et relativement bon marché. Cette dualité peut amener à des conflits de choix de développements ou à des études inutiles. Sans doute à cause de la crise économique, probablement, l’avenir proche indiquera quel principe d’organisation de réseau doit être retenu. Il est possible que des urgences manifestes dans certains secteurs économiques, conduisent à procéder à des décisions prochaines.
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